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Archives départementales de la Côte-d'Or

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Mars - La Guerre froide en Côte-d’Or (autour de 1950)

1188 W 171-5 « Paix impossible, guerre improbable », Raymond Aron définissait ainsi la Guerre froide naissante en 1948. Durant les années 1950, beaucoup d’affiches, de tracts et de brochures sont réalisés par les défenseurs du modèle communiste de l’URSS et par ceux du modèle capitaliste prôné par les USA.

Les termes choisis ne font pas dans la mesure. Ainsi la brochure de propagande communiste de 1951 compare-t-elle le président des États-Unis Harry Truman à Hitler. Le tract du mouvement anticommuniste Paix et Liberté joue quant à lui sur les mots avec le slogan « La pelle de Stockholm » (référence à l'appel de Stockholm, pétition contre l'armement nucléaire américain en 1950), qui « enterre les libertés ». Une guerre des images décryptée aux Archives départementales en mars 2019.

 « La pelle de Stockholm »1188 W 172-1

Le tract du mouvement anticommuniste Paix et Liberté joue sur les mots avec le slogan « La pelle de Stockholm » qui « enterre les libertés ». Il fait référence à l'appel de Stockholm, pétition contre l'armement nucléaire américain. Celui-ci a été lancé par le « Mouvement de la paix », émanation du parti communiste français, le 18 mars 1950, pour protester contre les travaux américains sur la bombe H. Des intellectuels et des artistes comme Louis Aragon, Pablo Picasso ou Thomas Mann l’ont signé. À cette époque, deux pays possèdent l’arme nucléaire : les États-Unis depuis 1945 et l’URSS depuis 1949.

Le mouvement Paix et Liberté est une association créée en 1950 par le radical Jean-Paul David avec le soutien du gouvernement Pleven, et financée par le ministère de l’Intérieur français pour lutter contre l’influence communiste. Son objectif est de dénoncer la menace communiste, en particulier les méfaits du stalinisme et le bellicisme de l’URSS. Environ 200 images tirées à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires chacune sont diffusées en six ans. Le document d’accompagnement est un second exemple significatif avec un titre accrocheur : «Le parti de la souveraineté nationale prend ses ordres à Moscou».

Sur le tract figurent au second plan des croix de couleur rouge sang et une liste de pays d’Europe centrale et orientale surmontée de la faucille et du marteau : les pays baltes, la Hongrie, la Bulgarie, la Roumanie, la Pologne et la Tchécoslovaquie. Ils sont tous devenus communistes depuis 1945 et appartiennent au groupe des « Démocraties populaires » placées sous la tutelle de Moscou. On retrouve ici les grands thèmes de la propagande antisoviétique : le communisme est l’adversaire des libertés. Il impose son idéologie par la force et élimine physiquement ses opposants. On relève également que l’ennemi n’a pas de visage. Seules ses bottes et une main également rouge sang sont dessinées.

1188 W 171-1« Hitler n’est pas mort »

La brochure de propagande communiste compare le président des États-Unis Harry Truman à Hitler. Elle était mise à la disposition des sympathisants communistes lors de la réunion électorale du 4 octobre 1951 tenue salle de Flore.

Elle affirme page de couverture : « Hitler n’est pas mort » et met en scène Oncle Sam qui distrait l’attention de Marianne tandis qu’à l’arrière plan des avions américains bombardent des populations civiles. Le contexte est la guerre de Corée dans laquelle l’armée américaine est pleinement engagée. La préface explique : « Il y a des mensonges qui tuent. L’anticommunisme est de ceux-là. Ce fut l’alibi d’Hitler pour conduire les peuples à la guerre. C’est l’alibi des nouveaux candidats à la domination mondiale ».

Cette brochure présente ensuite plusieurs caricatures stigmatisant l’impérialisme américain, y compris en utilisant l’imagerie antisémite, tout en associant une déclaration de Truman à un aspect du régime nazi. Des références explicites pour les Français comme Oradour-sur-Glane, les fours crématoires et des symboles SS sont mentionnées. Le portrait de Truman fait miroir à celui d’Hitler. Jean-Paul David, le fondateur du mouvement Paix et Liberté est « le Philippe Henriot du nouvel occupant ». Henriot, « le Goebbels français », pétainiste convaincu, secrétaire d’État à l’Information et à la propagande fut exécuté par des résistants le 28 juin 1944. Des similitudes sont établies par les auteurs de cette brochure entre le leadership des États-Unis et l’ancienne domination nazie. Un document complémentaire développe un thème semblable ; « ce que veulent les communistes : libérer la France de la menace de guerre, de la domination étrangère, de la misère, du danger fasciste », le danger fasciste étant pour les communistes symbolisé par les États-Unis.

1188 W 171-3 1188 W 171-7 1188 W 171-8

1188 W 171-6Ainsi les arguments avancés dans cette guerre idéologique sont outranciers. Ces deux documents illustrent cette guerre des mots. Si la Côte-d’Or est loin des terrains principaux d’affrontement de la Guerre froide tel Berlin, la Corée, ou Cuba, les soutiens des deux blocs qui y résident fourbissent leurs arguments et participent à la propagande effrénée de leurs leaders.

 

Sources : ADCO, 1188 W 171 et 172.

 

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